Les enfants du rock pas rock (11) : Voici une série d’articles sur des musiques « rock / pas rock » enregistrées avec des enfants.
Septembre 1971, un soulèvement de prisonniers éclate dans centre correctionnel d’Attica dans l’État de New York. Cette mutinerie qui se déclare peu de temps après l’assassinat du militant des Black Panthers, George Jackson, implique de nombreux détenus afro-américains dans un contexte de revendication des droits civiques, en protestation contre le racisme. La répression sera violente et fera des victimes… le gouverneur Nelson Rockefeller fera intervenir l’armée pour mettre fin à cette révolte d’être humains qui demandaient à être traités comme tels et non « comme des bêtes ». On se souvient du titre de Charlie Mingus « Remember Rockefeller at Attica », et ici Archie Shepp enregistre Attica Blues, comme un cri de révolte. Un classique.
C’est une jeune enfant, Waheeda Massey, qui chante « Quiet Dawn ». Elle est la fille du trompettiste et compositeur américain Cal Massey et avait sept ans lors de cet enregistrement ! Cal Massey participait au mouvement des Black Panthers et, lors du festival panafricain d’Alger, il a rendu visite à l’un de leurs premiers dirigeants, Eldridge Cleaver, qui vivait en exil dans cette ville. Au cours de cette visite, Cleaver a demandé à Cal Massey d’écrire la Black Liberation Movement Suite, dédiée aux leaders noirs.
L’album Attica Blues s’achève sur cette chanson, composée par son père, un peu comme une bossa nova mélangée à un hymne soul. Et la jeune Waheeda Massey, qui était à l’école primaire à l’époque, chante légèrement faux… ou en tout cas sa voix juvénile est légèrement à côté des notes pour être plus précis, car ces pas de côté ne me dérangent absolument pas. Car étrangement, c’est de cette toute petite voix pleine de conviction dont on se souvient une fois que la chanson et l’album sont terminés…. la mélodie de « Quiet Dawn » n’étant pas des plus facile à chanter, ces petites imperfections témoignent de l’innocence et de la vulnérabilité d’une enfant, mais amplifient aussi la puissance évocatrice de cet enregistrement essentiel.
Attica Blues est un album tellement puissant et politiquement engagé, qu’il était en soi révolutionnaire de faire chanter le dernier morceau par une enfant, car cela semblait dire : cette enfant est notre avenir, une fois adulte, elle sera la voix révolutionnaire noire de l’avenir.