I’m a cork on the ocean
Floating over the raging sea
How deep is the ocean?
How deep is the ocean?
I lost my way
(…)
These things I’ll be until I die

Je suis un bouchon
qui flotte au-dessus des flots déchaînés
Quelle est la profondeur de l’océan ?
Quelle est la profondeur de l’océan ?
J’ai perdu mon chemin
(…)
Ces choses, je les serai jusqu’à ma mort

Je me remémore ces paroles, en apprenant la disparition du génie Brian Wilson. Sa voix, ses compositions, toute la tristesse du monde dans une chanson. Ses mélodies comme de grandes montagnes russes, partant vers l’aigü puis se retournant en dehors de toute logique classique, mais d’une évidente évidence, d’une illogique implacable. Comme dans un rêve, on ne saurait contester ces micro mondes.

Prenez « Til I Die » chantée par les Beach Boys, extrait de l’album Surf’s Up (1971). L’une des chansons les plus personnelles des Beach Boys, inspirée par un moment existentiel que Brian Wilson a vécu sur la plage à un moment très sombre de sa vie. Un magnifique arrangement harmonique sur cette chanson, on croit voir rayonner les rayons de soleil, mais il y a un contrepoids, une dépression sous le soleil californien. Un mystère total. David Lynch pouvait lui aussi exprimer ça.

Prenez « Don’t Talk (Put Your Head On My Shoulders)» l’une des chansons les plus complexes sur le plan harmonique que Brian Wilson ait jamais composées. La tonalité est ambiguë, instable, mouvante… La voix glisse autour des notes. Les harmonies s’inversent, ce qui accentue l’instabilité tonale. Seul un génie extra terrestre a pu composer ça. Je ne vois pas d’équivalent (peut être Last Straw de Robert Wyatt, sur Rock Bottom, ou alors un morceau du Daniel Johnston des débuts).

Prenez « Caroline, No ». La mélodie parfaite. Les paroles décrivent la désillusion d’un homme qui repense à son amour perdu et à la douleur de voir quelqu’un changer. Sur le plan musical, le morceau a des teintes de jazz et un choix très spécial d’instruments, avec des flûtes basses et un clavecin. Le morceau suit un peu le même principe que « don’t talk », avec sa voix pure… mais part en fumée, s’évapore, et laisse place à de la musique concrète : le morceau se termine au son des chiens de Brian Wilson qui aboient, puis d’uns locomotive qui passe, échantillonnée à partir d’un disque d’effets sonores. Les chiens ne sont pas un artifice : ils chantent et prolongent le morceau.

Aujourd’hui je veux être comme le chien de Brian Wilson. Je veux prolonger et chanter ses morceaux